Quand on a décidé avec Vans de faire cet épisode Off The Bees sur Marion Haerty, on s’est dit que ça serait un petit challenge. Car BangingBees n’est peut-être pas le média le plus lié au Freeride World Tour dans l’esprit. Et justement, c’était encore plus intéressant et motivant d’arriver à faire une vidéo à notre sauce sur un sujet pas forcément évident. On est très fier de vous présenter cet épisode sur Marion Haerty, que l’on est allé filmer en Andorre sur le Freeride World Tour fin février et qui vient d’ailleurs de gagner un 4ème titre.
Interview Marion Haerty
Photos Mathis Dumas
Parles-tu un peu de tes débuts dans le snow ?
J’ai commencé le snowboard à 10 ans. J’ai eu une planche Décathlon sous le sapin de Noel car je voulais faire comme mon grand-frère. Mes parents habitaient à Saint-Martin d’Uriage. Je ridais donc beaucoup à Chamrousse. Je voulais m’inscrire au club mais comme je faisais trop de bêtises à l’école mes parents ont refusé au début. J’ai eu ma période rebelle où j’écoutais Evanescence et Avril Lavigne ! Puis mes parents ont déménagé en bas des 7 Laux et c’est là que j’ai commencé à faire beaucoup de park avec mes potes. J’ai fait pas mal de contest tout en recevant du matos de mes sponsors comme Vans ou Rossignol qui me suivent depuis le début. J’ai essayé d’aller aux JO de Sochi en slopestyle mais on était trop à la ramasse avec la fédé et du coup j’ai arrêté les contest freestyle.
Et niveau vidéo, comment as-tu commencé ?
J’ai toujours fait pas mal de park et filmé avec les potes comme le A Branler Crew avec Enzo Nilo, Victor Daviet, Victor De Le Rue, Félix Carlier… On se marrait bien même s’ils adoraient me faire des sales coups, surtout Enzo ! On s’est bien marré quand même. Je faisais aussi du street et un peu de backcountry pour des projets de filles comme les Machettes. Je suivais aussi souvent les potes comme Ben Thomas-Javid pour faire des kickers en backcountry et je sortais régulièrement des petites parts.
[vimeo id=”91788212″ width=”620″ height=”360″]J’ai réalisé que si je voulais faire du freeride, il fallait que je sois à Chamonix. Donc j’ai déménagé l’année suivante et j’ai gagné le World Tour.
Et comment as-tu fait la transition vers le Freeride World Tour ?
J’avais environ 23 ans et pas mal de potes m’ont encouragé à y participer. J’ai gagné les qualifiers et j’ai été invitée au World Tour. J’ai fini 3ème la première année et ça m’a vachement plu. Ensuite il y a eu une épreuve à Chamonix et j’ai dû rester sur place plus longtemps que prévu car ma voiture était en panne. J’étais chez mon pote Sam Favret, un skieur local qui m’a montré les spots et je suis tombée amoureuse de l’endroit. J’ai réalisé que si je voulais faire du freeride, il fallait que je sois à Chamonix. Donc j’ai déménagé l’année suivante et j’ai gagné le World Tour. C’est là que j’ai commencé à pouvoir vraiment vivre du snow et prendre mon indépendance.
Comment ta vie a changé après ce titre de championne du monde ?
J’ai été vachement sollicitée par les médias et les sponsors et je disais oui à tout donc je me suis épuisée. J’ai fini 2ème cette année-là puis j’ai appris à refuser certaines propositions et j’ai regagné le titre les deux années d’après. Ca m’a permis de faire parler de moi dans des médias plus mainstream. Mais pour moi ce n’est pas un problème car je vois ça comme une façon de promouvoir le snowboard vers un public plus large, peu importe ce qu’en pense le milieu core. Ces titres de championne du monde m’ont aussi permis d’aider mes parents financièrement quand ils en ont eu besoin et ça j’en suis fière.
Peux-tu nous parler un peu du Natural Selection ?
Ca a été une bonne galère administrative pour arriver à y participer à cause des restrictions du covid. On a failli ne pas avoir l’autorisation de rentrer sur le territoire américain. Je suis tombée malade en arrivant. Puis avant le contest, on ridait avec Victor De Le Rue et on s’est fait retirer notre forfait car on est passé sous une corde… J’étais la première surprise de faire une deuxième place vu les pointures qui étaient autours de moi. J’y suis allée sans pression. Je voulais faire un peu plus de freestyle mais je me suis complètement foirée en finale. Vu les filles en face de moi, des top freestyleuses qui ont gagné les X-Games ou les JO, je me suis dit que la meilleure stratégie était de faire ce que je savais bien faire et plaquer mes runs. Mais c’était fou d’être parmi toutes ces rideuses de légende.
J’ai envie d’amener plus de filles dans le snowboard et transmettre le bon message pour qu’elles aillent rider.
Ca te tient à cœur la scène snowboard féminine ?
Oui carrément. Je regarde ce que font les autres filles. Je suis admirative par exemple devant des rideuses comme Robyn Van Gyn ou Hana Beaman. Je trouve ça important de donner l’exemple aussi quand je sais qu’il y a des petites filles qui me regardent. J’ai envie d’amener plus de filles dans le snowboard et transmettre le bon message pour qu’elles aillent rider. Le problème dans notre société c’est qu’on fait croire aux filles qu’elles n’ont pas le droit de se faire mal, d’avoir des bleus ou des cicatrices. Mais c’est des conneries car chaque fille a le droit de faire ce qu’elle veut.
Et comment vois-tu l’avenir du snowboard féminin ?
Déjà je trouve qu’il y a beaucoup plus de filles qui font du skate. Quand j’ai commencé le skate, j’étais presque toujours la seule dans le skatepark. Mais ça se démocratise. Les filles ne se sentent plus obligées de faire juste du yoga ou de la danse pour s’exprimer. Au club de snowboard de Chamrousse par exemple, il y a plus de filles que de garçons ! Je suis contente de voir Anna Martinez, une jeune freerideuse de Chamonix qui ride super bien. On va aussi faire des nouveaux projets féminins pour The North Face avec Leanne Pelosi, Mary Rand et Jess Kimura.
Le freeride c’est super intéressant car je n’en finis pas d’apprendre. Il y a toujours des nouvelles façons d’aborder la chose…
Comment s’est passée ton évolution de rideuse de montagne plutôt freestyle à freerideuse de haute montagne ?
Le freeride c’est super intéressant car je n’en finis pas d’apprendre. Il y a toujours des nouvelles façons d’aborder la chose au niveau des choix des lignes, des manips de corde, du type de neige… Les premières années, j’ai pris des grosses claques où je me suis fait peur. Je sortais de mon snowpark de Chamrousse et je me suis retrouvée bloquée sur des glaciers ou dans des couloirs. Mais j’ai quand même envie de continuer à toucher à tout. Que ça soit faire une journée d’alpinisme dans des pentes bien raides ou rider un bon snowpark. Je n’ai pas envie d’être seulement mise dans la case freerideuse.
[vimeo id=”144925019″ width=”620″ height=”360″]Tu es toujours aussi passionnée par le snowboard ?
Oui carrément ça reste une passion. J’aime suivre tout ce qui se passe et j’adore mon rythme de vie où je peux rider quand je veux. Je suis trop contente d’avoir pu développer une planche de freeride pour fille avec Rossignol. Je me mets souvent la pression car je n’ai pas envie que ce style de vie s’arrête. Je veux continuer à faire du snowboard !